Emmanuel Lebou, ancien directeur de la solde au ministère des Finances, a récemment été condamné à une peine de 104 ans de prison par le Tribunal criminel spécial de Yaoundé. Cette sentence fait suite à sa reconnaissance de culpabilité dans une affaire de détournement massif de fonds publics. Selon plusieurs sources médiatiques, Lebou aurait créé un total de 2 601 faux comptes de salaires, lui permettant de détourner environ 1,8 milliard de francs CFA chaque mois pendant une période de dix ans.
L’affaire a éclaté le 2 mai 2018, lorsque des fonctionnaires soupçonnés de percevoir indûment des salaires fictifs ont été interpellés par les officiers du corps spécialisé de la police judiciaire de Yaoundé. Emmanuel Lebou faisait partie des six personnes arrêtées au cours de cette opération.
Dans une lettre de demande de clémence adressée au président Paul Biya le 9 juillet 2024, Emmanuel Lebou a exposé les difficultés rencontrées dans la préparation de sa défense. Il a mis en avant l’importance d’un document clé : le “rapport de mission du groupe de travail chargé de l’audit des remboursements des avances de solde et avances sur pensions au cours de l’exercice 2013”, qu’il a tenté, en vain, de faire certifier par le ministère des Finances.
Lire aussi : Le rôle du Tribunal criminel spécial au Cameroun
Lebou a multiplié les démarches administratives, notamment une correspondance envoyée le 9 mars 2020 à son avocat, Me KAMGA’NGATCHOU Jean-Jacques, pour demander la certification de plusieurs documents, dont ce rapport crucial. Il a également sollicité le Directeur des Affaires Juridiques du ministère des Finances le 15 octobre 2020, puis le Ministre des Finances le 3 mars 2022, sans succès.
En parallèle, il a tenté d’obtenir l’intervention de la présidence du Tribunal criminel spécial, invoquant l’article 346 du code de procédure pénale pour exiger la production des pièces essentielles à sa défense. Mais cette requête a été rejetée. Lebou affirme que ce rapport prouve l’existence de dysfonctionnements graves qui ont précédé son arrivée en tant que Chef de la Cellule informatique de la DDPP en 2015.
Selon lui, l’exploitation de ce document aurait permis de mieux comprendre les problèmes systémiques au sein du ministère des Finances. Cependant, les juges ont refusé de l’accepter sous sa forme non certifiée, se référant à l’article 313 du code de procédure pénale, qui impose la production de l’original ou d’une copie certifiée.
Dans sa lettre, Lebou s’étonne que le tribunal refuse de prendre en compte ce rapport, alors que certains de ses coaccusés ont pu librement en évoquer le contenu, confirmant ainsi l’audit de 2013, bien avant sa prise de fonction.
Lire aussi : International/People : Le rappeur français MHD condamné à 12 ans de prison
Face à cette impasse, Emmanuel Lebou en appelle à Paul Biya, en tant que garant de la justice et de la gestion transparente des finances publiques. Il espère que le président ordonnera au ministère des Finances de produire une copie certifiée du rapport, ou qu’il interviendra directement auprès du Tribunal pour permettre son utilisation dans le cadre du procès.
À travers cette ultime démarche, Lebou espère une clarification des responsabilités dans cette affaire et une prise en compte des dysfonctionnements systémiques qui ont conduit à sa condamnation.