À travers le livre de Jean Marie Atangana Mebara, l’opinion a un aperçu du côté complexe d’être Sgpr. Il est constant que le travail du SG/PR est une fonction qui attire de nombreux amis des bons jours, accroît les collaborateurs du bout des lèvres, gonfle les rangs des détracteurs et rend les ambitieux envieux et rancuniers.
Le mérite du livre de l’ancien secrétaire général de la présidence de la République, édité par l’Harmattan, intitulé «Le secrétaire général de la présidence de la République au Cameroun ; entre textes, mythes, et réalités», est d’avoir quelques révélations intéressantes. L’une des parties de l’ouvrage dénommée “dialogue” peut être considérée comme une image de ces moments exaltants avant et durant le séjour de l’auteur à la tête du secrétariat général de la présidence de la république. Les lecteurs sont emmenés dans une ballade à travers un parcours sinueux couvrant la nomination, la fonction, la relation avec le chef de l’État, la relation avec les institutions étatiques et pour couronner le tout, le rôle du Sgpr dans les nominations des autorités importantes de l’État telles que les membres du gouvernement et les directeurs généraux. Le même niveau de pondération et de tranquillité dans l’expression a guidé le choix des mots de l’ancien collaborateur de Paul Biya lorsqu’il s’est agi de parler du chef de l’État. L’accent est mis sur la relation de travail cordiale qu’il a eu avec son patron et président. Le Président était, depuis son entrée à la présidence, je crois, un homme de dossiers. Il l’est demeuré même lorsqu’il est devenu président de la République. Des dizaines de parapheurs de dossiers lui étaient transmis chaque soir par le Secrétariat général, et sans doute par les autres structures de la présidence, et le lendemain, tous les parapheurs provenant du Secrétariat général revenaient, avec des instructions ou des annotations de la main du président. Sur les notes d’information ou de compte-rendu, il apposait généralement une espèce de ”V”, ou alors ”Vu”. Et lorsqu’il voyageait, évidemment le rythme de circulation des parapheurs diminuait. Mais les dossiers nécessitant qu’il soit rapidement informé ou qu’il prenne une décision lui étaient quotidiennement envoyés par fax.» Bien qu’étant en prison, il faut bien reconnaître que M. Atangana Mebara, à travers cet ouvrage, donne aux Camerounais et à d’autres suffisamment de quoi se mettre sous la dent, au sujet de la fonction de Secrétaire général de la présidence de la République. « À dire vrai, je pense aussi que beaucoup de personnes ignorent réellement le rôle et les capacités du Secrétaire Général de la Présidence de la République, y compris parmi ceux qui pourtant ont servi ou servent l’État à des niveaux élevés de la hiérarchie » avoue-t-il.
L’auteur reconnaît qu’il existe différents quolibets sont ou au moins ont été utilisés au Cameroun par les medias ou l’opinion publique pour désigner le Secrétaire Général de la Présidence de la République : Vice-Président, Vice-Dieu, Premier Ministre bis… C’est aussi non sans fondement que certains se sont demandé s’il ne s’agit pas de fonctions “maudites”. Ainsi, écrit l’ex-SgPr, dans un article publié dans l’hebdomadaire camerounais Repères du 19 mai 2010, le journaliste Parfait Siki, avait déjà titré : « Secrétaire Général de la Présidence : une fonction à hauts risques ». Dans le style généralement professionnel et modéré qui le caractérise, ce journaliste résume assez bien la panoplie des idées et opinions qui circulent au Cameroun sur la fonction de Secrétaire général de la Présidence. Il part de l’observation que la trajectoire fulgurante de M. Paul Biya, passé de ministre d’État Secrétaire Général de la Présidence de la République à Premier ministre, puis à Président de la République, en une douzaine d’années, a donné à la fonction de SG/PR « le statut d’antichambre du pouvoir. » Depuis lors, poursuit ce journaliste, « la fonction de SG/PR attire et apparaît comme une consécration de la confiance absolue du chef. Mais c’est aussi le siège d’un incommensurable pouvoir statutaire. La réalité du pouvoir du SG/PR est plus grande (que ce qu’en disent les textes). Il est le patron administratif du pays. En principe sous l’autorité du chef du gouvernement, il est de fait le passage obligé de toute décision politique majeure du gouvernement. Mieux, le décret du 22 octobre 1998 lui donne le droit de veiller à la réalisation des programmes d’action approuvés par le Président de la République et impartis aux chefs de départements ministériels et aux services relevant de la présidence de la République. Une sorte de contremaître de l’action gouvernementale, qui attribue les bons et les mauvais points. Il est à la tête des renseignements généraux de la police et de l’armée, des services secrets et du contre espionnage. Aussi est-il au moins aussi bien informé que le chef de l’État luimême, parfois plus. » Son emprise sur le travail parlementaire est aussi réelle.
Aucun projet de loi n’arrive au bureau de l’Assemblée Nationale sans passer par le sien… Donc, le SG/PR dispose d’un pouvoir prééminent dans les domaines politique, administratif voire parlementaire. « Et l’argent alors ? Outre une partie du budget de la Présidence de la République – qui n’est pas discuté à l’Assemblée nationale – le secrétaire général de la présidence de la république est ex-officio président du conseil d’administration de la société nationale des hydrocarbures, usine à fric de l’État. »
Au-delà des supputations et autres interprétations de couloirs, le décret n°2011/408 du 09 décembre 2011 portant organisation du gouvernement, est clair là-dessus : le Secrétaire général de la présidence reçoit du Président de la République (Sg/pr) toutes les directives relatives à la définition de la politique de la Nation ; suit l’exécution des décisions prises par le Président de la République, coordonne l’action des Administrations rattachées à la Présidence ainsi que précisées aux articles 5 et 37 du décret suscité ; instruit les dossiers que lui confie le Président de la République et suit l’exécution des instructions données ; … assure la mise en forme, en liaison avec le SG des services du premier ministre ou des ministres concernés… veille à la réalisation des programmes d’action approuvés par le Président et impartis aux chefs de départements ministériels, en liaison avec le Sg des services du premier ministre, les conseils restreints, les et les commissions présidés par le Pr, assure l’enregistrement des actes réglementaires signés et des lois promulguées par le Pr ; ainsi que leur publication au journal officiel, assure la tenue et la conservation des archives législatives et réglementaires, exerce le rôle de conseil juridique de la présidence de la République et des administrations. »