Le mépris des reporters sur le terrain, l’accès difficile aux documents officiels et rendus publics, frustrations et autres mésestimations sur le terrain, rétentions abusives des reporters sur le terrain lors des couvertures médiatiques… sont des difficultés auxquelles font face les braves adeptes du crayon et du micro sur le terrain. Pourtant, dès le lendemain, l’organisateur devient très exigeant et veut voir ses images passer au journal officiel télévisé, ses sons passer à la radio, et ses articles de presse dans les tabloïds. De qui se moque-t-on ?
Le journaliste sur le terrain ne fait pas la magie. Il relate et relaie les faits et autres événements sur le terrain lors des reportages. Il fait des couvertures médiatiques, des investigations journalistiques et dénonciations dans l’optique de relayer, mettre en lumière, aider à la manifestation de la vérité, ou alors faire bouger les lignes. C’est un travail de dur labeur, un risque énorme. Mais c’est un travail salutaire. Le journaliste est le miroir de la société.
Curieusement, il est l’homme le plus négligé sur le terrain. L’on observe sur le terrain, des reporters à qui le dossier de presse est refusé, s’il existe. Des reporters à qui tout un discours est carrément refusé, pourtant ce discours qui a été prononcé publiquement, devrait faire l’objet de plusieurs copies distribuées rapidement aux reporters en vue d’un traitement fidèle des actualités y afférentes. L’on observe également des reporters à qui l’on impose après une cérémonie, de se soumettre au cocktail, pourtant le reporter n’a pas le temps de manger et de boire, il est très préoccupé à écrire rapidement ses articles et à faire un rendu rapide. Il ne doit pas être soumis aux dispositions protocolaires, il faut le libérer rapidement.
Certains organisateurs tardent à libérer les journalistes formellement conviés aux couvertures médiatiques sous le fallacieux prétexte qu’ils doivent attendre, parfois attendre le cocktail, attendre qu’on libère d’abord X, Y ou Z. Non, c’est un tort. Le journaliste en reportage est celui qui doit être libéré le premier. Apprenez à libérer d’abord la presse lors des cérémonies ! Cela est juste et bon.
Le responsable en charge des relations avec la presse devrait lors d’une cérémonie, disposer déjà de toute la documentation nécessaire au traitement de cette actualité, qu’il devra mettre à la disposition de tous les organes de presse présents, invités ou pas. S’il y a quelques viatiques prévus en termes de frais de couverture médiatiques, il faut les remettre aux reporters le plus rapidement possibles, soit avant la fin de la cérémonie ou bien immédiatement après la cérémonie. L’idéal serait même, en tout début de la cérémonie, afin que, tout juste après les interviews, les journalistes soient immédiatement prêts à partir. Partir pour faire leurs papiers car, plus vous libérez tôt un reporter, mieux il fait rapidement son rendu et davantage l’actualité sera diffusée à temps. N’attendez pas grand-chose de lui si vous lui avez donné du fil à retordre.
Le journaliste s’invite tout seul lorsqu’il y a un événement, sauf que celui-là n’attendra pas grand-chose de l’organisation. Dès lors, mettez quand même à sa disposition toute la documentation nécessaire pour un meilleur traitement de cette actualité. Quelques viatiques également si possible, mais pas obligatoire puisque son nom ne figure pas parmi les médias formellement conviés.
Saisissez les organes de presse bien avant la cérémonie, évitez les coups de fil des dernières minutes, au risque d’embarrasser les organes de presse dont les reporters sont déjà déployés ailleurs.
Respecter la presse et le travail des journalistes. S’ils sont contents, ils pourraient faire objectivement leur travail et vous mettre en lumière. S’ils sont mécontents, ils peuvent bâcler votre travail, qui pis est, vous servir des murs d’images, des mauvaises productions sonores, ou des frappes chirurgicales en presse écrite. Evitez d’entraver le travail de la presse. Ils peuvent faire et défaire. Ils savent le faire. Ils sont très dangereux.
Pour ce qui est de l’investigation journalistique, ouvrez vos portes au journaliste qui vient recueillir votre version des faits dans le cadre d’un dossier préoccupant. Si vous n’êtes pas habileté à vous prononcer dessus, recevez le quand même et dites le lui. Vous pouvez même lui faire des confidences en off. Il sera tenu de garder confidentialité, vous deviendrez pour lui une source d’information, le journaliste étant interdit de dévoiler ses sources. Toutefois, rappelez lui que vous vous confiez en off. Il respectera. Sachez également que plus vous êtes très accueillant vis-à-vis de la presse, mieux vous tenez les journalistes en haleine, davantage ils vous gardent en estime et/ou vous mettent en lumière. À l’opposé, plus vous vous en méfiez et les tenez à distance, mieux vous vous faites remarquer négativement et davantage ils vous foudroient et vous détruisent sur l’espace public, pour briser l’opacité.
Le journaliste est d’abord un être humain, il a des amis, il est sensible, il sait garder de très bonnes relations. Sauf qu’il n’aime pas la perfidie, la déloyauté et les coups en dessous de la ceinture. Dans ces cas, il change catégoriquement et devient méconnaissable. Il sait être ondoyant et divers, il sait être insaisissable et très dangereux, il sait prendre des risques et se plaît à vivre dangereusement. Evitez de le frustrer, de l’intimider et de le menacer. Vous aggraverez la situation et le journaliste signera lui-même et volontairement, son arrêt de mort. Sauf que la mort ou le malheur d’un journaliste ne passe jamais inaperçue et la riposte est terrible. Evitez d’être à l’origine ou de contribuer à la mort d’un journaliste. Vous en aurez pour votre propre compte. De même, évitez de tromper le journaliste en lui confiant des informations erronées ou tronquées avec une inexactitude des faits, vous en aurez également pour votre propre compte.
Soyez larges et généreux envers les hommes de médias ! Au Cameroun, ils tirent le diable par la queue et ne vivent que des largesses de leurs carnets d’adresses. Toutefois, évitez d’utiliser cette magnanimité pour les soumettre à votre seule volonté, pour les contraindre à pour écouter ou à vous mettre en lumière. Les journalistes n’aiment pas ça. Ils évoluent par conviction et en fonction de leurs lignes éditoriales, qui parfois, est contraire à vos attentes. Il faut savoir le comprendre. Evitez de faire chanter la presse ! Elle a le pouvoir, le 4e pouvoir !
En bon entendeur…
Par Engelbert MFOMO